Le jeudi 7 juin 2012

SociétéQuébec

Manifestations nocturnes à Québec: le petit guide des souricières du SPVQ

Ou comment récolter de manière discutable 250 000$ d'amendes en cinq étapes faciles

La corruption au royaume du Parti Libéral du Québec ]

Par AmériQuébec

38 manifestations nocturnes pacifiques à Québec. Aucun débordement, aucun grabuge. Mais 500 arrestations qui totalisent 250 000$ d’amendes. Pourquoi, et surtout, comment? Bienvenue dans le petit monde de la souricière du SPVQ.

Note: Cet article ne porte pas sur le sujet: “Comment être un ministre libéral, frauder le gouvernement et s’en sortir avec une prime de départ de 122 000$”. À ne pas confondre, puisque la méthode diffère radicalement.

« À Québec, nous travaillons de cette façon depuis le début » – Le SPVQ, au sujet des arrestations de masse en souricière

Première chose, il incombe de préciser que les policiers de Québec n’appliquent pas cette façon de faire depuis le “début”, si par début on entend le début de la grève.

Maintenant peut-on se donner l’effort d’expliquer précisément quelle est justement cette façon de faire et peut-être aussi la questionner? Les policiers de Québec sont effectivement très méthodiques et utilisent la souricière depuis quelques mois maintenant, principalement lors des arrestations nocturnes. Les policiers de Québec sont tellement méthodiques et prévisibles (la prévisibilité des manifestants est elle aussi au rendez-vous) qu’on peut vous détailler la méthode qui est maintenant parfaitement rodée.  On en a déjà parlé ici, mais ça vaut la peine de le répéter.

1. Déclarer la manifestation “illégale”

Chaque arrestation de masse à Québec suit une procédure bien précise. À la première étape, on se donne un prétexte, l’absence de trajet, pour déclarer la manifestation illégale.  L’utilisation du mot prétexte est très importante, puisqu’en absence de grabuge ou de violence à Québec, il faut bien un prétexte pour arrêter 500 personnes. Déjà que la notion même de “manifestation illégale” ne repose sur aucun fondement juridique, il importe aussi d’ajouter que les avis de dispersion des policiers sont parfois accessoires et reposent sur le code de sécurité routière.

Ainsi, à la minute où les gens veulent manifester sans avoir de trajet précis et qu’ils ne sont pas assez nombreux, le processus est enclenché.

2. La souricière

La manifestation est désormais “illégale”! Félicitations! C’est donc le temps de passer au niveau 2, la souricière.

C’est très simple, ça consiste à encercler les manifestants de sorte à ce qu’il ne soit pas possible pour eux de quitter les lieux. C’est le genre de chose qui se fait très facilement dans une petite rue comme la rue St-Jean. L’objectif n’est pas de coincer toute la manifestation, mais de coincer un nombre appréciable de manifestants. Par appréciable, on parle généralement de 60 à 150 manifestants et manifestantes.

Le périmètre se limite généralement à un tronçon de route qu’on retrouve entre deux intersections.  Qu’on retrouve dans le périmètre des touristes, des résidents du secteur qui étaient sortis de leur foyer 30 secondes au mauvais moment pour s’acheter une pinte de lait au dépanneur, des mères de familles ou une personne aveugle, ça n’a aucune importance. Le sort de ceux qui se retrouvent dans ce périmètre est systématiquement le même. Négociateurs de la CLASSE et député de l’opposition inclusivement. Il faut le préciser, parce que c’est déjà arrivé.

Un manifestant tente de sortir pendant que la souricière se prépare? À moins de voir une issue qui n’a pas encore été bouclée (c’est une question de secondes avant qu’elle ne le soit) et de s’y précipiter, il est inutile de partir en direction des policiers avec l’intention de collaborer. Avec un peu de chance, on lui bloquera simplement le chemin ou on le poussera avec fermeté.

Il est digne de mention de souligner que cette manière de fonctionner n’est pas légale. En effet, cette technique a été utilisée lors du G20 à Toronto et est aujourd’hui dénoncée:

Revenons un instant au rapport ontarien, qui vient nous rappeler que «le droit de protester et de manifester, le droit au rassemblement pacifique, sont fondamentalement associés aux pratiques démocratiques». Et que la présence de quelques fauteurs de troubles ne constitue pas une raison valable pour suspendre ces droits… Il me semble que cette conclusion vaut aussi pour le Québec.

3. Les menottes avant le grand tour d’autobus!

Super, on a maintenant encerclé le bétail. Petit problème, ils sont beaucoup! À chaque problème, sa solution! Les autobus du Réseau de Transport de la Capitale ne sont jamais très loin. De beaux bus vides du RTC qui se transformeront rapidement en confortable havre de paix où on pourra y corder les dangereux manifestants qui auront été préalablement menottés, les mains dans le dos.

Parce que oui, il faut les menotter! C’est une particularité made in Québec. On menotte des manifestants à qui on remettra des constats d’infraction.

Ah, j’ai oublié l’étape où on énumère aux manifestants leurs droits et en vertu de quoi on les menotte et les arrête…. Mais non, c’est une blague! Ce n’est pas inscrit dans le guide de procédure. En effet, à aucun moment un manifestant placé dans un autobus ne se fera lire ses droits alors qu’il passera souvent plusieurs heures bien menotté! On a une excellente excuse au SPVQ si on se fait poser la question: ce n’est pas une vraie arrestation puisqu’au final aucune accusation ne sera portée, il s’agit de simples “interpellations” qui résultent en constats d’infraction.

Maintenant, pourquoi donc menotter dans le dos des centaines de personnes qui n’opposent aucune résistance si ces dernières ne sont pas vraiment en état d’arrestation? Le SPVQ a aussi une réponse pour ça, et sérieusement, c’est flamboyant: “On affirme que les attaches sont nécessaires afin de protéger les manifestants dans les autobus, au cas où un individu serait armé.” Oui, au SPVQ, on a la sécurité des gens à coeur et on protège les manifestants d’eux-mêmes. Ça arrive trop souvent, pour ne pas dire toujours, que les manifestants se poignardent entre eux avec leurs clés si on ne les menotte pas, alors on n’est jamais trop prudent.

4. Charivari euphorique dans la Ville de Québec dans les bus du RTC

Les manifestants sont désormais à la place qu’ils méritent, assis les mains dans le dos, dans plusieurs autobus. On y passera plusieurs heures. Tout d’abord, ça dépend du nombre de personnes à arrêter (on les arrête un à un, et ça prend au moins une minute par personne!). Ensuite, ça dépend du trajet de la chasse au trésor qui sera différent pour chaque autobus.

Les différents autobus du RTC où logent les manifestants se déplaceront donc aux quatre coins de la ville dans des endroits aussi inusités que questionnables, comme le Colisée Pepsi ou Place Fleur de Lys. Habituellement, le carrosse de Cendrillon s’est déjà retransformé en citrouille pusqu’il est déjà passé minuit.

5. La fin d’une belle et longue épopée qui rapporte à la Ville de Québec!

Ça fait un certain moment qu’attendent les manifestants arrêtés… oups! Interpellés, désolé. Ils sont désormais identifiés, et on leur explique enfin que s’ils sont menottés, c’est parce qu’ils ont contrevenu à l’article 500.1 du code de sécurité routière qui stipule:

Nul ne peut, au cours d’une action concertée destinée à entraver de quelque manière la circulation des véhicules routiers sur un chemin public, en occuper la chaussée, l’accotement, une autre partie de l’emprise ou les abords ou y placer un véhicule ou un obstacle, de manière à entraver la circulation des véhicules routiers sur ce chemin ou l’accès à un tel chemin.

Bien sûr, chacun d’eux hérite à chaque fois d’une amende de 494$.

Il est intéressant de souligner que ce code n’a pas été systématiquement appliqué lors des manifestations sans trajet qui avaient lieu avant les manifestations nocturnes. Par exemple, il y a 2 mois, une petite vague de manifestations sans trajet se sont produites, dont au moins deux qui se seront terminées en sit-in au Complexe G.

À l’une d’entre elles, la manifestation d’environ 300 personnes aura déambulé dans les rues de Québec durant près de 3 heures sans même que la police réagisse, et ça c’était si elle était présente. Passant de l’Assemblée Nationale au Complexe G, de à l’hôtel de Ville, à l’édifice Price puis au boulevard Charest, ce genre de manifestation pacifique n’émoustillait pas les policiers qui à cette époque étaient effectivement très tolérants, il faut le mentionner.

Parlant de tolérance, on s’intéressera dans un prochain article à la tolérance du SPVQ. Un sujet qui intéressera sans doute plusieurs.

3 commentaires à cet articleFlux RSS des commentaires

  1. 1 Michaël Lessard Le 7 juin 2012 à 22h45

    Excellent guide !

    Une info importante : loi loi 500 date de l’année 2000 (puis révisé en 500.1) et n’a PAS été appliqué avant 2012!

    Même durant le Sommet des Amériques, elle ne fut pas utilisée!

    Et oui, moi et d’autres avons manifesté à Québec pendant 12 à 15 années, et nous n’avons jamais vu ça. J’étais au Sommet en 2001, au G20 même, dans des manif sans trajet, et c’est la première fois de ma vie que je me fais arrêter… lors d’une petite manifestation féministe le 27 avril qui était peace and love. C’était surréaliste.

    À noter que ces amendes risque fortement de ne pas passer et que la police occasionne donc au peuple des coûts futiles et engorge la cour municipale pour rien.

  2. 2 CLOVIS SIMARD (@CLOVISSIMARD) Le 8 juin 2012 à 7h16

    CHAREST LE MAUVE EST UN PSYCHOTIQUE CORROMPU ET SA SECTE LIBÉRALE EST COMPOSÉE DE CLONES SANS AUCUNE AUTONOMIE.

  3. 3 Patriote 1837-38 Le 8 juin 2012 à 15h36

    Connaissez-vous le petit livre rouge et noir « Pour être un parfait anarcho-communiste anti-capitaliste »

    1e- Rassembler plus de 50 personnes sans prévenir les autorités et sans donner d’itinéraire pour la manifestation.

    2e – Informer seulement le « black bloc » du but et de l’itinéraire anarchique de la manifestation.

    3e – S’assurer qu’il y aura beaucoup; de voyeurs, de paparazzis, de caméras médiatiques et de policiers en armure.

    4e- Débuter la manifestation, illégale, pacifiquement et par la suite réchauffer la foule par des slogans ; anti-gouvernement, anti-autorité, anti-obéissance civile, anti-loi spéciale 78, enfin de compte anti-tout…..

    5e- S’assurer d’avoir les parapluies noires pour que les « black bloc » puissent revêtir leur uniforme en toute intimité.

    6e – Et enfin « wide open » pour la fête anarchique provocatrice en espérant que l’on verra sur les vidéos et les photos, la matraque des policiers dans des éventuelles arrestations.

    7e- Faire un « debriefing » à la suite de la manifestation, pour améliorer l’anarchie de la prochaine.

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Cet article de 1,299 a été rédigé par AmériQuébec il y a 11 ans et 10 mois, le jeudi 7 juin 2012.

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