Le lundi 2 février 2009

SociétéQuébec

Pour le français dans nos universités

Le cas de l’Université de Sherbrooke

L'état de la langue française ]

Par Impératif Français

L’Université de Sherbrooke est une université francophone. Or, les étudiants qui se promènent dans les couloirs peuvent voir des affiches décrivant les travaux de recherche de leurs professeurs rédigées en anglais. Implicitement, on envoie donc le message à ces étudiants que le français est inapte à assurer une telle fonction.

Le Dr Charles Durand, auteur de La mise en place des monopoles du savoir et ex-directeur de l’Institut de la Francophonie pour l’informatique de Hanoï, réfute éloquemment les arguments (en faveur) de l’affichage unilingue anglais dans les universités québécoises de langue française et la publication qu’en anglais des résultats des recherches scientifiques.

Les responsabilités linguistiques des établissements d’enseignement supérieur québécois francophones

L’Université de Sherbrooke est une université francophone. Or, les étudiants qui se promènent dans les couloirs peuvent voir des affiches décrivant les travaux de recherche de leurs professeurs rédigées en anglais. Implicitement, on envoie donc le message à ces étudiants, qui ont pourtant choisi de faire leurs études en français, que toute recherche sérieuse doit se faire an anglais ou, au moins, de faire l’objet d’une communication en anglais, donc que le français est inapte à assurer une telle fonction.

À qui ces affiches sont-elles destinées? À des anglophones, à des visiteurs étrangers? Non, ceux qui vont en prendre connaissance seront les étudiants, le corps enseignant, les administrateurs de l’université… Pourquoi s’adresser à ces gens en anglais, alors qu’ils
comprennent tous le français? À quoi peut bien servir une langue, le français en l’occurrence, si on ne peut pas l’utiliser dans tous les domaines de l’activité humaine? Si l’on se met à restreindre l’usage du français à certains secteurs uniquement, comment pourrait-on encore être fiers de le parler? Surtout, comment pourrait-ondéfendre encore son usage vis-à-vis d’une autre langue qui ne présenterait pas de telles restrictions?

Une langue ne disparaît pas du jour au lendemain. C’est un phénomène progressif. Petit à petit, l’usage de la langue se retire des domaines intellectuels, de la science, de la philosophie, des lettres pour ne laisser qu’un parler vernaculaire, de peu d’utilité. Si les Québécois francophones veulent continuer à parler leur langue et aspirent à ce qu’elle soit respectée, aucun domaine ne doit s’en exclure, surtout pas la recherche de pointe, surtout pas les sciences d’avant-garde! En affichant des descriptions de leurs recherches en anglais, ce sont les professeurs qui, implicitement, disent à leurs étudiants qu’ils sont dans un ghetto à la périphérie duquel l’anglais est indispensable, puisqu’ils leur refusent l’usage de leur langue pour communiquer les résultats de la partie censée être la plus créative de leur activité.

En refusant l’affichage dans une langue autre que le français pour présenter les travaux de recherche faits à l’Université de Sherbrooke, les administrateurs refusent d’envoyer un message implicite qui serait équivalent à dire aux étudiants : « Votre langue ne sert à rien, surtout pas à la profession à laquelle vous vous destinez! Vous êtes dans un ghetto dont la seule issue est l’anglais! »

C’est bien cela qui est véhiculé par des affiches en anglais sur le travail qui se fait à l’université. Cet anglais-là n’est pas synonyme d’ouverture. Il nie le fait français en Amérique du Nord. Il prône l’intolérance vis-à-vis de cette langue, il conforte l’arrogance des Canadiens anglais, il confirme les Anglo-saxons dans leur orgueil de peuple « supérieur ».

Comme Eugene Garfield, il clame haut et fort que « ce qui n’est pas écrit en anglais ne vaut pas la peine d’être lu »! D’autre part, quels messages envoie-t-on aux visiteurs éventuels qui ont l’occasion de poser leurs regards sur de telles affiches? Que la science doit s’exprimer en anglais? Que le français est inapte pour assurer une telle fonction? Que l’anglais est intrinsèquement supérieur? Que les résultats d’une quelconque recherche ne sont communicables qu’en anglais? Que la langue française, avec ses 200 millions de locuteurs, sans compter la population des pays membres de l’OIF (qui dépasse 500 millions), est une langue équivalente au hongrois, au suédois ou au finnois?

Le français est pratiquement la seule langue, avec l’anglais, qui soit enseignée vraiment partout sur la planète et qui bénéficie vraiment d’une diffusion internationale sur cinq continents. Doit-on affaiblir son statut en suggérant aux autres de communiquer en anglais quand il s’agit de science ou de technique? D’ailleurs, pourquoi s’arrêter aux sciences et aux techniques? Pourquoi ne pas étendre l’anglais comme véhicule de communication en médecine, au génie civil? Pourquoi ne pas commencer à étudier l’anglais à six ans plutôt qu’à onze? Pourquoi ne pas commencer à trois ans plutôt qu’à six? Et puis pourquoi encore parler français si l’anglais est plus « utile » et plus « international » dans tous les domaines?

Il est plus important d’avoir des affiches décrivant la recherche scientifique en français dans une université francophone que des affiches en français de films étasuniens doublés dans cette langue dans le centre-ville de Montréal.

Quand les scientifiques francophones avaient des choses à dire qu’on n’entendait nulle part ailleurs, ils étaient compris partout dans leur langue. Des mathématiciens, des physiciens ou des sociologues tels qu’Henri Poincaré, Jacques Hadamard, Marie Curie ou Gustave Le Bon n’écrivirent pas une seule ligne en anglais de toute leur vie. On les traduisait et leur réputation était véritablement mondiale.

Ceux qui pensent que ce qui n’est pas écrit en anglais ne vaut pas la peine d’être lu font preuve d’une rare ignorance. Il suffit d’observer ce qui se passe dans les laboratoires de recherche japonais où tout ce qui peut avoir, même de loin, une quelconque application industrielle est publié en japonais exclusivement de façon à pouvoir en faire profiter des industriels japonais en priorité. Ce n’est que beaucoup plus tard, quand les techniques tombent dans le domaine public, que des traductions en anglais, ou dans d’autres langues, apparaissent.

L’usage de l’anglais par les chercheurs japonais est utilisé uniquement pour donner le change aux occidentaux, pour glaner ce qui peut se révéler intéressant dans les conférences internationales et pour véhiculer une information scientifique de moindre qualité vers les pays occidentaux dont les scientifiques continuent naïvement à croire qu’ils sont ainsi informés de ce qui se fait en recherche au Japon. Néanmoins, on commence à s’en douter lorsqu’on observe la différence énorme de qualité entre ce que les Japonais impriment en anglais dans le domaine scientifique et les réalisations supérieures de leur production industrielle dans le secteur médical, en optique, et en électronique, par exemple.

De plus en plus, l’intolérance ne consiste pas à accepter d’entendre et de lire de l’anglais lorsqu’on se préoccupe de science et de technologie. L’intolérance, c’est d’accepter que toute langue autre que l’anglais, dont l’usage fût-il même sporadique, soit totalement interdit lors de congrès scientifiques prétendument internationaux. L’intolérance, c’est d’imposer dans un nombre croissant de cénacles, à l’intérieur même de pays francophones, l’interdiction de faire usage de notre langue.

Dans un tel contexte, il est indispensable de renforcer lavisibilité de la langue française, SURTOUT dans le domaine scientifique. […] La documentation scientifique, les outils de travail en français, les manuels en français, les publications en français, ne vont pas être rédigés par des martiens, mais par les scientifiques et les professeurs des universités francophones. Cela commence, semblerait-il, par la diffusion d’informations scientifiques de vulgarisation EN FRANÇAIS, comme celles qui devraient orner les affiches apposées sur les murs des corridors de l’université.

[…] Qui doit relever ce défi d’une plus grande vitalité du français dans la communication scientifique sinon les scientifiques francophones eux-mêmes? Le débat sur les langues est truffé de fausses évidences et d’affirmations fallacieuses. Je crois qu’elles ne sont pas trop difficiles à trouver dans le texte de messieurs Trudel, Grignon et Fortin.

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