Le vendredi 5 août 2011

QuébecPolitique

Pauline Marois et le PQ: une question de confiance

Il faudrait que Pauline Marois s'applique très rapidement à rétablir la confiance dans les rangs indépendantistes

Par Richard Le Hir

On se trouve devant un important déficit de confiance à l’endroit du PQ, mais aussi devant une impatience grandissante à voir l’indépendance se faire, vu le risque de « louisianisation » qui nous guette et que de récents appels au Canada anglais à un afflux important de nouveaux immigrants rendent désormais beaucoup plus certain dans un avenir rapproché.

Au fond, quand on y réfléchit bien, le désenchantement des indépendantistes à l’endroit du PQ et de Pauline Marois tient essentiellement à une question de confiance.

Ils ne font plus confiance au PQ pour constituer le véhicule privilégié de leurs aspirations nationales, ils ne font plus confiance au PQ pour constituer le meilleur défenseur de nos intérêts collectifs, ils ne font plus confiance au PQ pour constituer le meilleur défenseur de la langue française et de notre identité culturelle contre le risque de l’assimilation.

Et ils ne sont pas du tout convaincus que Pauline Marois est suffisamment populaire pour remporter une lutte électorale, et a suffisamment d’étoffe pour devenir première ministre.

Qui plus est, ils sont convaincus, sondages aidant, qu’une grosse partie de la population partage leur point de vue à cet effet.

Ça fait beaucoup.

Alors, nombre d’entre eux ont déjà quitté le PQ ou s’apprêtent à le faire, à la recherche d’un nouveau véhicule qui répondrait mieux à leurs ambitions et à leurs craintes. Certains privilégient la voie citoyenne tout en étant bien conscients que leur travail ne servirait à rien si, le moment venu, ils ne pouvaient compter sur un parti ouvert à leur option pour passer de la parole au geste.

D’autres persistent à croire que l’indépendance est d’abord la chose d’un parti, et refusent désormais d’accorder leur soutien à tout autre que celui qui s’engagerait à en faire sa seule et unique priorité.

Donc non seulement nous trouvons-nous devant un important déficit de confiance à l’endroit du PQ, mais aussi devant une impatience grandissante à voir l’indépendance se faire, vu le risque de « louisianisation » qui nous guette et que de récents appels au Canada anglais à un afflux important de nouveaux immigrants rendent désormais beaucoup plus certain dans un avenir rapproché.

Il est cependant curieux que ceux qui s’inquiètent le plus de ce dernier risque soient également les plus disposés à courir celui de reporter l’indépendance aux calendes grecques en sous-estimant la difficulté et le temps nécessaire à mettre sur pied un nouveau parti, sans parler de le faire élire.

La situation est donc très délicate, et c’est ce qui m’a amené dans trois articles parus en juillet à affirmer que, devant la gravité de la situation, le PQ demeurait le seul choix réaliste, et que nous ne pouvions pas lâcher sans tenter de sauver les meubles un parti dans lequel nous avions tant investi, malgré la juste colère des espoirs trahis.

On apprenait récemment que Pauline Marois avait l’intention de rester à la barre du PQ. Dans les conditions actuelles, il s’agit d’un pari dangereux, pour l’indépendance, pour le PQ, et pour elle-même, et il n’est pas dit qu’elle parviendra à le relever.

Si toutefois l’occasion devait lui en être fournie, et il n’est pas dit qu’elle le sera, il faudrait qu’elle s’applique très rapidement à rétablir la confiance dans les rangs indépendantistes

  1. en s’engageant fermement en faveur de l’indépendance (et non plus de la souveraineté) sans pour autant s’engager à la réaliser dans un premier mandat (soyons réalistes, il y a beaucoup de travail à faire avant que nous soyons prêts);
  2. en s’entourant de personnes connues pour leur engagement indéfectible à la cause de l’indépendance;
  3. en ramenant ses brebis égarées au bercail (les quatre députés qui ont claqué la porte);
  4. en s’engageant fermement à prendre toutes les mesures nécessaires pour défendre nos intérêts collectifs et contrer le vol de nos richesses naturelles (à ce sujet, voir la prestation aussi inspirante qu’électrisante de Daniel Breton, président de Maîtres chez nous au 21e siècle (MCN 21) lors de la rencontre du NMQ);
  5. en s’engageant fermement à extirper la corruption de nos moeurs politiques et en lançant une vaste enquête sur l’emprise et les méthodes du crime organisé, notamment, mais pas exclusivement, dans le secteur de la construction;
  6. en s’engageant fermement à rétablir l’intégralité de la Charte de la langue française et en recourant à la clause nonobstant au besoin, un droit reconnu;
  7. en s’engageant à prendre toutes les mesures nécessaires pour prémunir le Québec contre le risque de la « louisianisation ».

Tout mégotage de sa part sur ces conditions de base au rétablissement de la confiance contribuerait à l’amplifier, et il n’est pas dit non plus qu’elle parviendrait ainsi à regagner la confiance de tous les indépendantistes, mais il est certain qu’elle se trouverait à en rallier un très grand nombre, sans l’appui desquels tout espoir de dégager une majorité électorale serait illusoire, malgré tous les efforts qu’elle pourrait faire pour marginaliser les dissidents.

Que cela lui plaise ou non, une bonne part de la crédibilité politique de son parti auprès de la population tient à la notion qu’il représente le courant indépendantiste. Si elle estime que c’est désormais un boulet, on le saura assez rapidement par le peu d’empressement qu’elle mettra à prendre les engagements qui viennent d’être évoqués, et tout espoir de sauver les meubles étant alors perdu, les indépendantistes seront pleinement justifiés de transporter leurs pénates ailleurs.

Pour ce qui est du PQ, il serait alors condamné à se voir reléguer aux banquettes arrières de l’Opposition à l’Assemblée Nationale, sans même l’assurance d’être officiellement reconnu. Pauline Marois, quant à elle, passerait à l’histoire pour avoir été le fossoyeur de son parti.

Triste sort !

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Article original: Vigile.net - Richard Le Hir

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Profil: Avocat et conseiller en gestion, ministre délégué à la Restructuration dans le cabinet Parizeau (1994-95)

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Cet article de 853 a été rédigé par Richard Le Hir il y a 12 ans et 8 mois, le vendredi 5 août 2011.

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