Les élections en Iran, un moment historique?

Les récents bouleversements en Iran suite aux résultats de l’élection samedi dernier proclamant la victoire du président sortant Mahmoud Ahmadinejad nous forcent à nous questionner sur nombre d’enjeux résultant d’un possible changement de régime.

Tout d’abord un rappel des plus récents évènements. Selon les données officielles, Ahmadinejad a obtenu 62.63% du vote alors que son opposant, le réformateur Mir Hossein Mousavi, a obtenu 33.75%. Ce dernier s’est lui aussi déclaré vainqueur et a pris plusieurs mesures pour défier ce qu’il juge comme une « trahison au vote du peuple ».

Selon la chaine Al Jazeera, plusieurs Iraniens n’ont pu voter en raison du manque de bulletins de vote et les autorités auraient aussi bloqué les messages textes envoyés par cellulaires. Ceux-ci étaient utilisés par l’équipe de Mousavi pour faire sortir le vote chez les jeunes électeurs. De plus, certains experts croient très surprenant qu’Ahmadinejad puisse obtenir une si grande majorité des voix alors qu’ils s’attendaient à une lutte très serrée, et qui selon certains favorisait le réformiste Mousavi.

Selon les dires de Fareed Zakaria à l’émission GPS sur CNN, il serait très improbable que Ahmadinejad puisse recueillir autant de voix, car historiquement le candidat réformateur était favorisé lorsqu’il y avait un taux élevé de participation.

Sommes-nous témoins d’un changement de régime? Selon l’opinion de Gary G. Sick, ancien conseiller des présidents Ford, Carter et Reagan concernant la politique au Moyen-Orient, un changement de cap s’est effectué cette semaine en Iran. Comme il l’explique, le principe même de la création de la République islamique au cours des années 1970 était basé ur le support de la population. Ce faisant, l’Ayatollah Khomeini avait entamé la révolution islamique en limogeant le Shah qui avait été installé par les États-Unis et la Grande-Bretagne suite à un coup d’État en 1953.

Que les résultats soient exacts ou faussés, ce qui importe c’est le sentiment chez une proportion croissante de la population iranienne que leur régime se transforme petit à petit en une dictature. Comme l’affirme Gary G. Sick, les Iraniens se souviennent encore des évènements d’août 1953 (le coup d’État ayant délogé le Premier ministre Mossadeth) alors que ceux-ci se sont déroulés il y a plus de 50 ans.

Bien qu’il soit encore trop tôt pour tirer des conclusions, il ne fait pas de doute que les manifestations qui ont lieu dans les rues de Téhéran en ce moment même auront des répercussions majeures dans ce pays. Ces évènements ont d’ailleurs pris par surprise la communauté internationale. En effet, l’Iran semblait un pays plutôt stable au niveau interne. Même si la population iranienne n’est pas du tout satisfaite du bilan économique du gouvernement Ahmajinejad depuis le début de son mandat il y a 4 ans, peu d’experts auraient pu prévoir il y a quelques mois que le candidat réformiste avait vraiment une chance de gagner l’élection présidentielle, voire d’engendrer un mouvement de résistance et de contestation tel qu’on n’en a pas vu depuis l’émergence de la République islamique à la fin des années 1970.

Même l’Ayatollah Khomeini, qui avait publiquement félicité Ahmadinejad, a changé son fusil d’épaule ce matin même en déclarant qu’il y aurait une enquête interne pour déterminer s’il y a eu fraude électorale.

Enfin, les prochains jours nous en dirons plus. Il sera intéressant d’analyser l’opinion internationale des gouvernements concernant la validité des élections et la pression qui tombera sur les épaules du président sortant résultant de sa perte de légitimité. Qui sait, peut-être sommes-nous témoins du changement de régime tant attendu à Téhéran?

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