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Abus de pouvoir

Abus de pouvoir. C’est le titre du livre que vient de publier M. François Bayrou, candidat a l’élection présidentielle de 2012 pour le MoDem, dans lequel après une longue et profonde réflexion sur l’évolution de la situation politique en France, il en arrive a un constat alarmant : « Mais chemin faisant, page noircie après page noircie, après réflexions approfondie et rencontres multiples, François Bayrou a mis le doigt sur autre chose : il a vu la mise en place clandestine d’un pouvoir autonome puissant, alliant des banques, des médias, des industriels et des fonctionnaires. Un système en réseau qui pourrait exister un jour indépendamment des pouvoirs publics et éventuellement en mesure de défier la volonté démocratique des Français exprimée à la suite d’une élection. La constitution d’un tel noyau dur comme on disait du temps de Balladur, est considérée par F.Bayrou comme un danger mortel pour la République. »1

M. Bayrou dénonce trois abus de pouvoirs auxquels les citoyens sont confrontés. Le troisième nous intéresse particulièrement puisqu’il met aussi bien en péril sa République que l’état du Québec :

« (…) Troisième abus de pouvoir, plus difficile à évoquer parce que nous n’en voyons que la partie émergée de l’iceberg, c’est que ce régime met progressivement en place un réseau – des réseaux – sur la société française, qui unissent des intérêts financiers, des intérêts médiatiques, des intérêts industriels, des intérêts politiques. La caractéristique de ces réseaux, c’est qu’ils ne disparaissent pas avec l’alternance.

(…)

Le Fouquet’s, c’était (…) la scène primitive du sarkozysme, qui n’était pas élu depuis trois minutes que se réunissaient, dans le lieu de la richesse démonstrative, les vrais vainqueurs. La plus grosse fortune de France, la plus grosse fortune de Belgique, la plus grosse fortune du Québec, des milliardaires comme s’il en pleuvait, des médias amicaux comme s’il en pleuvait. C’était les vrais vainqueurs. Pendant ce temps, les pauvres bougres place de la Concorde, ils attendaient, ils se battaient les flancs. » (( Voir Nicolas Sarkozy a une espèce de religion de la puissance sur Contre Info ))

On l’aura compris, la plus grosse fortune du Québec désigne Paul Desmarais, le monarque d’un réseau d’intérêt de plus en plus puisant qui squatte notre État et qui pèse de plus en plus lourd pour contrer la volonté d’émancipation du Québec. M. Pierre Dubuc a très bien compris le jeux de sape du Seigneur de Sagard, entre autre couper le Québec des appuis de la France2. Et M. Parizeau a lui aussi bien vu que, ce qui motivait la déclaration de Sarkozy contre le mouvement souverainiste, c’était les intérêts économiques français dans le ROC. Et ils sont importants :

Areva: Dans un contexte de privatisation de l’industrie nucléaire canadien, cette entreprise est sur les rangs pour vendre 2 centrales nucléaires à l’Ontario : « Areva is considered AECL’s chief rival for the Ontario reactor deal. » (( Voir Nuke deal still up in the air dans le Toronto Sun )) Ce qui améliorait ses chances sur le marché mondial (70 centrales nucléaires dans les prochains 15 ans).

La pétrolière Total a fait le constat que les sources d’énergies conventionnelles avaient atteint un « plateau » (théorie du pic pétrolier). Elle a donc réorienté sa stratégie pour les décennies à venir vers des sources de pétrole non conventionnelles, dont la plus importante au monde est en Alberta: les sables bitumineux. Son avenir passe donc par l’Alberta :

« That’s why Canada (…) figure so large in the company’s future. They hold the world’s biggest reserves of heavy crude (known as “oil sands” in Canada…).

(…) The company plans to spend as much as $20-billion (U.S.) over the next decade developing its Alberta oil sands portfolio,

(…) The province figures so prominently in Total’s future that the company is in the early stages of planning a heavy oil upgrader in Edmonton with a capacity of 130,000 to 230,000 barrels a day and a price tag of $5-billion to $10-billion. »3

Total et Areva pèsent lourd dans orientation de la politique extérieure de la France. En fait avec Sarkozy au pouvoir, elles la déterminent. Or, ces deux entreprises ont maintenant des projets majeurs dans le Canada anglais; ce qui est à prévoir c’est que le Québec va servir de faire-valoir pour l’avancement de ces projets. Ce qui n’augure rien de bon pour les relations France-Québec.

M. Bayrou, comme Aristote à son époque, va à l’essentiel : Qui contrôle l’État? Et au profit de qui?

La démarche rigoureuse de M. Bayrou pour prendre la mesure du danger qui guette la République et le courage qu’il affiche pour prendre la posture qui convient pour faire face au défi qui se pose aux citoyens, témoignent d’un sens de l’État qui devrait servir d’exemple à d’autres politiciens; particulièrement ceux du Québec. Car si un tel réseau représente un « danger mortel » pour la République française, un État mature, qu’en est-il du péril du Québec, demi-état annexé. À cet égard son combat est aussi le nôtre. Et il importe de comprendre qu’il est vital!

Pour faire face à l’abus de pouvoir, à quand un Bayrou québécois ?

  1. Voir Un livre d’avance sur le Blog de la rédaction []
  2. Voir Caisse de dépôt: on veut de vraies réponses sur Vigile []
  3. Voir Nuke deal still up in the air dans le Toronto Sun []